Charles Dubouix
Dernière mise à jour 12/12/2023
Réglementation : Le Système d'Échange de Quotas d'Émissions
- Le marché carbone de l’Union Européenne (SEQE) incite les industries polluantes à se décarboner en fixant un prix du carbone.
- Le secteur des transports est de plus en plus impacté :
- Intégration du secteur maritime dès janvier 2024
- Extinction progressive des quotas gratuits pour l’aérien entre 2024 et 2026
- Intégration du routier dès 2027
- Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières dès octobre 2023.
- Les conséquences pour les chargeurs est le renchérissement du prix des transports reposant sur des énergies fossiles, ainsi que de nouvelles démarches administratives.
Qu’est-ce que le SEQE ?
Le Système d'Échange de Quotas d'Émissions (SEQE ou ETS en anglais), mis en place en 2005, est un mécanisme clé dans la stratégie climatique européenne visant la neutralité carbone d'ici 2050. Il s'agit du plus grand marché réglementé de carbone au monde, opérant sur le principe de "plafonnement et échange". Ce système fixe un plafond sur les émissions de gaz à effet de serre des entreprises, leur allouant ou les obligeant à acheter des quotas équivalant à leurs émissions. Le nombre de quotas diminue annuellement, induisant une hausse du prix des quotas et incitant ainsi les entreprises à réduire leurs émissions pour rester rentables.
Qui est concerné ?
Le SEQE cible principalement les industries lourdes à forte intensité énergétique comme la production d'électricité et de chaleur, les raffineries, l'industrie manufacturière (y compris fer, acier, papier, verre, aluminium), le ciment, les produits chimiques, les engrais, l'hydrogène, l'aviation intra-européenne, et, depuis 2024, le transport maritime.
Évolutions récentes
En mai 2023, l'UE a rehaussé son objectif de réduction des émissions de GES pour 2030, passant de -43% à -62%. Les ambitions du SEQE sont également renforcées avec la volonté d’accélérer le retrait des quotas gratuits et de s’étendre à de nouveaux secteurs.
Depuis octobre 2023, pour protéger l’industrie Européenne et contrer les fuites de carbone dues au retrait progressif de certains quotas gratuits , l'UE a instauré le Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières (MACF ou CBAM en anglais).
Pour en savoir plus, visionnez notre webinar d’Octobre.
Comment le SEQE impacte les chaines logistiques ?
Aviation
Le secteur est inclu dans le dispositif depuis 2012. Cependant, l’impact financier reste très limité. Seuls les vols au sein de l'Espace économique européen sont concernés, et la grande majorité des quotas sont attribués gratuitement. L’UE a voté le retrait progressif des quotas gratuits entre 2024 et 2026 et considère inclure les vols entre l'UE et le reste du monde.
Transport maritime
Dès janvier 2024, le SEQE s'applique à tous les services maritimes ayant une escale dans l'UE :
- 100% des émissions seront considérées pour les trajets entre deux ports de l’UE
- 50% des émissions pour les trajets entre les ports de l’UE et les ports de pays tiers
Les compagnies maritimes devront déclarer leurs émissions et acheter un montant équivalent de quotas sur le marché du SEQE de l’UE, selon un calendrier progressif :
- en 2024, 40 % des émissions déclarées devront être converties en quotas
- en 2025, 70 % des émissions déclarées
- à partir de 2026, 100 % des émissions déclarées
Routier
Le transport routier sera inclus dans le SEQE à partir de 2027, via un marché parallèle (le SEQE II).
Quelles conséquences pour les chargeurs ?
L'entrée du secteur maritime dans le SEQE induit des couts pour les compagnies maritimes, qui sont répercutés sur les chargeurs sous forme de "surcharges ETS".
Par ailleurs, le MACF oblige les importateurs européens dès octobre 2023 à des reportings trimestriels et induiront un impact financier dès 2026 avec l’obligation d'achat de certificats MACF.
Quel regard Ovrsea porte sur cette directive ?
Le SEQE est un outil très puissant permettant d’atténuer l'empreinte carbone d’un secteur responsable de 7 à 11% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Et ce pour trois raisons:
- L’intégration d’une externalité négative (les émissions carbone) dans les coûts permet d’aligner les décisions environnementales et financières, encourageant les acteurs du secteur à adopter des solutions logistiques plus écologiques.
- La mesure et les déclarations CO2 auxquels sont soumis les transporteurs renforceront la précision et l'uniformité des données carbone accessibles par les chargeurs et commissionnaires, facilitant évaluation et amélioration des performances environnementales de leurs chaines logistiques.
- Le réinvestissement ciblé des fonds générés par le SEQE et le MACF accélérera le développement et l'adoption de technologies plus propres dans le secteur du transport.
Les défis et les inquiétudes autour du déploiement du SEQE préfigurent les transformations majeures que s’apprête à vivre le secteur pour se conformer aux accords de Paris.
Pour aller plus loin : d’autres marchés du carbone ?
Au delà du périmètre Européen, la vision du SEQE et du CBAM est de montrer la voie et d’inciter les autres régions du monde à mettre à leur tour en place des marchés du carbone. Si les initiatives se multiplient à travers le monde, elles ne couvrent que 23% des émissions mondiales et les prix du carbone sont très fluctuants, ils varient de quelques centimes à 130$/tC02. Il est encore trop tôt pour savoir si la diffusion escomptée se produira ou si des mesures de contournements seront préférées par les pays tiers.